Le polar historique et les traumatismes de la Grande guerre

Les anciens combattants de la Grande guerre sont des personnages de choix pour le polar historique. Sans avoir besoin d’en savoir beaucoup plus, le lecteur comprend déjà que ce sont des personnes qui, revenues de l’enfer, ont vu la mort et l’âme humaine sous toutes leurs coutures et en sont souvent sorties traumatisées.
Elles sont donc capables du meilleur… et du pire. Vraiment du pire du pire, genre tueries en série et tortures diverses et variées.

Le dernier roman d’Odile Bouhier, La Nuit, in extremis, s’inscrit dans cette veine. Dans le troisième épisode de cette série lyonnaise inaugurée en 2011 avec Le Sang des bistanclaques, elle continue d’explorer le développement de la police scientifique des années 1920. Car, face à ces nouvelles dimensions du crime, il faut aligner de nouvelles méthodes d’investigations. Nous retrouvons donc le commissaire Kolvair et le policier scientifique Salacan, à Lyon en 1921. Kolvair est persuadé qu’un de ses anciens compagnons de tranchées qui vient de sortir de prison est sur le point de commettre des meurtres. Afin de mieux le surveiller, il s’installe dans la pension de famille où l’homme a loué une chambre…

Outre Odile Bouhier, le sillon « traumatismes de la Grande guerre » est également creusé par d’autres auteurs.
On ne peut tout d’abord pas passer sous silence le magnifique Un Long dimanche de fiançailles de Sébastien Japrisot.

uldf620-350Citons aussi Didier Daenincks et sa Der des der. En 1920, René Griffon est un ancien soldat reconverti en détective privé. Le colonel Fantin de Larsaudière lui demande d’enquêter sur une affaire de chantage qui concernerait son épouse volage. Mais Griffon comprend vite que le colonel n’est pas le héros qu’il prétend être, et que le chantage concerne plutôt son passé trouble. Il a en particulier participé au massacre de soldats russes dans la Creuse en septembre 1917. Avec l’aide d’un militant anarchiste, Griffon va découvrir la face cachée du comportement du colonel pendant la guerre.

L’intrigue de The Return of Captain John Emmett d’Elizabeth Speller rejoint un peu celle de Daenincks. Le lecteur suit en 1920 l’enquête de Laurence Bartram, ancien officier en 1914-1918, qui recherche la vérité au sujet du soi-disant suicide de son ami John Emmett, ancien officier comme lui.

Les belles séries Maisie Dobbs de Jacqueline Winspear et Ian Rutledge de Charles Todd explorent aussi les ravages de la Grande guerre.
Dans ses enquêtes, Maisie rencontre des personnes qui ont survécu à la guerre mais non sans destructions intimes et profondes.
En 1919, dans Héritage mortel de Charles Todd, l’inspecteur Rutledge de Scotland Yard est marqué à vie par la guerre, et surtout par l’exécution du caporal Hamish MacLeod, condamné pour insoumission. Fiona, la fiancée de MacLeod, a été arrêtée car des rumeurs disent que son fils ne serait pas le sien, mais celui d’une femme qu’elle aurait tuée. Rutledge est convaincu que Fiona est innocente. Accompagné par les paroles d’Hamish qui le hantent, il mène l’enquête.
Les autres épisodes de la série sont aussi à lire pour ceux que la période passionne.

Enfin, concluons ce bref panorama avec le très prenant Un fleuve de ténèbres de Rennie Airth. Nous sommes en 1921 en Angleterre. Une famille est massacrée dans un manoir du Surrey. Pour l’inspecteur Madden, il ne s’agit pas d’un banal cambriolage, mais de l’oeuvre d’un psychopathe qui pourrait encore frapper.

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